Le nouveau cadre de financement des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) a été signé le 19 juin 2019 entre l’Union nationale des caisses de l’assurance maladie (Uncam) et les syndicats représentatifs. Les CPTS permettent aux professionnels de santé d’un territoire de se coordonner pour adapter l’offre de soins de ville aux besoins de la population. Le docteur Claude Leicher, Président de la Fédération nationale des CPTS, revient sur leur déploiement et leur ambition.
Quel premier bilan tirez-vous de la mise en place des CPTS ?
Plusieurs dizaines de CPTS sont aujourd’hui effectives sur les 300 projets de CPTS répertoriés.
Nous le constatons sur le terrain : les CPTS répondent à un vrai besoin des professionnels de santé de l’ambulatoire comme des établissements de santé. À terme, elles permettront d’organiser le secteur ambulatoire sur l’ensemble du pays.
Avec la mise en place des maisons de santé et des équipes de soins primaires, l’exercice coordonné est déjà entré dans la culture professionnelle des acteurs de l’ambulatoire. Les CPTS tirent leur spécificité et leur pertinence du fait qu’elles sont impulsées par les professionnels de santé eux-mêmes dans le but de répondre aux problématiques identifiées sur chaque territoire. Leur mise en place donne une légitimité aux acteurs de soins de ville qui souhaitent s’organiser entre eux.
Les CPTS répondent aussi aux besoins des établissements de santé en leur apportant une visibilité claire des différents acteurs de l’ambulatoire sur leur territoire.
Depuis plusieurs mois, nous connaissons une accélération des projets mis en place, puisqu’il n’y avait que 200 projets répertoriés en janvier 2019. Cela s’explique par la mobilisation des syndicats professionnels engagés dans les négociations de l’accord interprofessionnel depuis début 2019, et dont la mobilisation sera essentielle dans les années à venir.
Le récent accord interprofessionnel doit permettre d’enclencher une dynamique forte de création des CPTS sur l’ensemble du territoire. Que prévoit-il ?
Il permet de donner un cadre de financement aux CPTS, à la fois pour rémunérer leur fonctionnement et pour accompagner leurs missions de santé.
L’accord comprend deux parties fonctionnelles. La première est centrée sur les conditions de fonctionnement des CPTS : elles doivent tenir compte des besoins de santé identifiés sur le territoire choisi, être pluridisciplinaires et déposer leur projet auprès de l’ARS. Le deuxième volet concerne le financement et le socle de missions des CPTS. Ces derniers devront désormais remplir trois missions obligatoires : faciliter l’accès aux soins, améliorer l’organisation des parcours de soins et s’engager dans le champ de la prévention. À cela viennent s’ajouter deux missions complémentaires et optionnelles : s’engager au service de la qualité et de la pertinence des prises en charge et soutenir l’attractivité sanitaire du territoire.
Ce financement, qui pourra aller de de 185 000 €/an pour les plus petites CPTS à 380 000 €/an pour les plus grandes, est primordial. Nombreuses sont les CPTS qui ont besoin d’embaucher un professionnel pour coordonner leurs actions ou simplement recueillir les coordonnées des professionnels du territoire. Elles nécessitent aussi de s’équiper en outils numériques : agenda partagé, messagerie sécurisées, logiciels pour accompagner la gestion des parcours de soins, etc.
L’enveloppe globale de l’Uncam est aujourd’hui de 300 millions €/an. Mais plus les CPTS couvriront de grands bassins de population, plus leurs besoins en coordination et en outils seront importants. À l’avenir, on peut imaginer que leur financement évolue, comme cela a été le cas avec les maisons pluriprofessionnelles de santé. En parallèle, les missions des CPTS pourront être élargies.
De quelle manière pourra-t-on atteindre l’objectif gouvernemental de 1 000 CPTS d’ici à 2022 ?
Cet objectif sera atteint grâce à la mobilisation de tous les acteurs engagés aujourd’hui : l’État, les syndicats professionnels, les établissements de santé sur le territoire, les professionnels de santé… Tout le monde a intérêt à voir se développer les CPTS sur le territoire.
Il faut cependant rester réalistes : si l’objectif est bien de mailler l’ensemble du territoire avec 1 000 CPTS en 2022, l’ensemble des structures ne pourront pas forcément être toutes opérationnelles en termes de services rendus. C’est un chantier d’ampleur que nous devons mener, avec à terme pour chaque professionnel de santé en ambulatoire un double conventionnement : national avec sa profession et territorial dans une CPTS. C’est une vraie révolution. Si 1958 correspond à la structuration de notre secteur hospitalier actuel avec la création des CHU, ces dernières années marquent quant à elles le démarrage d’un grand chantier, celui de l’organisation de l’ambulatoire avec l’exercice coordonné, en maisons de santé pluri disciplinaires et en CPTS.